Aujourd’hui fondateur de son propre atelier, Florian Delépine remportait le premier prix du concours Design Zéro Déchet 2013 en inventant l’Université Populaire du Bricolage. Retour d’expérience dans ce quatrième épisode de « Sur les traces de… ».
Aujourd’hui fondateur de son propre atelier, Florian Delépine remportait le premier prix du concours Design Zéro Déchet 2013 en inventant l’Université Populaire du Bricolage. Retour d’expérience dans ce quatrième épisode de « Sur les traces de… ».
Nul doute que l’UPB aurait trouvé sa place lors du concours DZD 2019, en partie dédiée aux produits de bricolage. Pourtant, ce projet a vu le jour lors de la deuxième édition, alors que le sujet était encore laissé libre aux participants. « Le concept était de mettre en forme un lieu qui reprendrait le principe des universités populaires, à savoir la transmission du savoir pour tous, mais appliquée aux objets », explique le lauréat. Un espace et un mode de fonctionnement qui permettraient donc aux usagers de créer et réparer. Le tout dans un état d’esprit d’écoconception, d’échanges et de mise en réseau pour réduire les impacts négatifs, sociaux comme environnementaux.
Les adhérents de l’UPB auraient ainsi pu bénéficier de ressources (machines, documentation, savoir-faire…), louer un espace de travail, faire un stage, acheter des matériaux issus du réemploi… Un concept reposant sur l’usage, plus que sur la possession d’objets.
Ressourceries, fablabs, bricothèques, chantiers d’insertion… Autant de sources d’inspiration pour Florian. « Cette idée vient de la volonté de trouver des manières d’exercer mon métier de designer. C’est-à-dire d’imaginer des objets et des scenarii, tout en étant utile à la société », résume-t-il. « Je voulais aussi montrer que des étudiants s’intéressaient à l’écoconception, aux problématiques liées aux déchets, et tentaient de faire bouger les lignes. »
Après la remise des prix, l’Université Populaire du Bricolage a pris forme de plusieurs manières. Après avoir travaillé à la Réserve des Arts, Florian et son associé Arnaud Paulet ont créé l‘Atelier TAC.Rejoints par la designer Manon Congard, ils fabriquent du mobilier et des aménagements sur-mesure en réemployant des matériaux : bois, métal, textiles… D’autre part, cet ex-étudiant de l’ENSCI est président et co-fondateur de l’association l’Arcanderie à Orléans, qui met à disposition outils, atelier et compétences pour ses adhérents.
« J’étais déjà sensible à l’écoconception avant le concours, mais cette participation m’a incité à continuer dans cette voie », poursuit Florian. « J’étais heureux d’avoir eu le premier prix, surtout dans un concours qui a une approche un peu moins « mode » du design ». Et pour les futur.es participant.es qui souhaitent participer au concours Design Zéro Déchet, l’expérimentation est pour lui la clef du succès. « Creusez-vous la cervelle, testez, cherchez, inventez des solutions pour rendre nos objets moins polluants, moins générateurs de déchets, ou pour imaginer des systèmes permettant de réduire le nombre d’objets mais d’en améliorer la qualité. » Le message est passé !
Il y a deux ans, Pockeco remportait le 2e prix du concours Design Zéro Déchet. Conçu par Victoire Bailleul, Blanche Dujardin et Lucie Kalawon, ce projet leur a permis de mobiliser leur propre expérience en tant que festivalière pour trouver des solutions. Retour d’expérience avec Lucie et Blanche dans ce troisième épisode de « Sur les traces de… ».
À l’origine de la participation des trois étudiantes de Valenciennes au concours : la Paris Design Week ! « Lucie a entendu parler du concours Design Zéro Déchet dans ce cadre et elle avait très envie de faire un projet écoresponsable. Elle nous a convaincues ! », explique Blanche. « En tant que designer nous agissons au début de la chaîne de production, nous avons une responsabilité sur ce que nous créons », affirme Victoire.
Une sensibilité qu’elles ont pu exprimer lors du concours Design Zéro Déchet 2018, qui avait pour thématique la prévention des déchets dans l’espace public. Un vaste sujet, pour lequel les étudiantes de l’école Rubika se sont inspirées de leurs souvenirs de festival. « Il y a toujours ce même constat à la fin : une étendue de détritus à l’emplacement de l’événement », raconte Victoire. « Et les festivals sont des milieux fermés, où les consignes sont plus faciles à mettre en place », complète Blanche.
C’est ainsi qu’a été conçu Pockeco, un packaging alimentaire réutilisable, consignable et modulable, permettant de former 4 types de contenant grâce à un système de pliage. De quoi s’adapter à tous les types de nourriture nomade servie en festival !
Le groupe a ainsi remporté la 2e place du concours grâce à ce projet ! « Je dirais qu’il faut croire en son projet, s’assurer qu’il est réalisable et qu’il n’y a pas d’impacts non maîtrisés, conseille Blanche aux futurs participants. C’est super important de faire attention à tout, même si ce n’est pas facile. »
Outre la dotation décernée et l’exercice de rigueur imposé, les lauréates gardent de bons souvenirs de leur participation. « C’était très formateur car c’était ma première participation à un concours, raconte Blanche. C’était intéressant de découvrir tout l’éco-système qui se cache derrière, et puis il y avait aussi l’opportunité d’être exposées à la Paris Design Week ».
Sans oublier le développement de qualités humaines, fortifiées par des valeurs communes. « Ce que j’ai particulièrement aimé dans ce projet c’est la complémentarité au sein de notre équipe et le fait que l’on soit toutes les trois autant impliquées », se rappelle Victoire.
Pour l’heure, Pockeco n’a pas encore été concrétisé « même si on s’est posé la question », affirme Blanche. « Il y a encore beaucoup de travail à mener sur ce produit, explique Victoire. Actuellement le choix du matériau nous pose encore problème, mais nous gardons toujours à l’esprit de le réaliser un jour ! »
Et pour la suite ? « Pour moi, l’écoconception n’est pas un sujet en soi, résume Blanche, qui vient de terminer son stage de fin d’études. J’y étais déjà très sensible avant le concours, et je considère plutôt cela comme un paramètre. J’aimerais que cela fasse partie de ma démarche, mais qu’elle ne se résume pas à ça. »
Depuis Pockeco, Victoire est diplômée d’un master en Design Produits et Services et a repris une formation en design digital. Elle est aujourd’hui UX Designer dans une agence à Paris. « En tant qu’étudiant il faut se préparer à la réalité du terrain : bien souvent c’est la viabilité économique d’un projet qui prime, concède-t-elle. Même cela évolue dans le bon sens dans les entreprises. »
Grâce à son projet « Calcite », Sanam Viseux remportait le 3e prix du concours Design Zéro Déchet 2014. Depuis, qu’est-elle devenue ? Comment concilie-t-elle design et déchets ? Quels sont ses conseils pour les futurs participants ? Réponses dans ce deuxième épisode de « Sur les traces de… ».
Pour Sanam, le concours Design Zéro Déchet tombait à pic. Dans le cadre de son diplôme pour l‘ENSCI, elle avait engagé un travail sur la valorisation des déchets coquillés. « L’école nous a présenté le concours, qui collait parfaitement à mon sujet de recherche », se souvient-elle. C’est comme cela qu’est né Calcite, un projet de collecte de coquilles de Saint-Jacques, moules et huîtres auprès des professionnels pour les transformer en un matériau écologique.
Son inspiration ? Un livre sur la mise en place des systèmes de collecte des déchets. « J’y ai appris qu’autrefois, les coquilles faisaient partie des déchets qui bénéficiaient d’un traitement spécifique ! », nous raconte Sanam. Un premier constat qu’elle a rapidement confronté à la réalité. « Pour DZD et les projets de design en général, il faut questionner les autres, entretenir un lien avec les artisans et les industriels pour avancer tous ensemble… », conseille-t-elle. En concevant Calcite, elle a ainsi interrogé un poissonnier pour connaître ses pratiques, et nourrir sa réflexion sur la collecte de ces déchets plein de ressources.
« Aujourd’hui on parle beaucoup du recyclage des plastiques, mais plein d’autres déchets ont des propriétés intéressantes », soutient-t-elle. C’est donc le cas des déchets coquillés qui, une fois nettoyés, séchés et broyés en poudre calcaire, peuvent connaître de multiples applications.
Pour son diplôme, Sanam a ainsi produit chez elle une série de petits objets durables et réutilisables pour la salle de bain, grâce à l’impression 3D. Ces accessoires ont ensuite été complétés par la création de carreaux décoratifs, inspirés par les belles teintes naturelles des coquilles. Et ce n’est pas tout ! Les déchets coquillés ont également été transformés en briques de construction, en remplaçant le sable par la poudre calcaire. « Je me suis vraiment intéressée à ce sujet après avoir vu un reportage terrifiant sur la disparition du sable, raconte Sanam. On y apprend que cette ressource est pillée au détriment de la faune et de la flore pour faire du béton, des composants électroniques, du plastique, des cosmétiques… ».
Pas de doute, Sanam a la fibre de l’éco-conception. « Calcite m’a aidée à trouver ma voie », affirme-t-elle. Et même si son projet n’a pas pu être concrétisé car elle a été embauchée juste après son diplôme, la dimension environnementale est toujours aussi importante pour elle et le concours Design Zéro Déchet a laissé sa marque.
Aujourd’hui, en tant que designer Couleurs et Matières au sein du Groupe Renault, Sanam considère que « les matières recyclées font partie du design, avec des produits très typés, qui apportent du relief et de l’identité aux produits neufs. Ils racontent une petite histoire supplémentaire ».
Et même si cela n’est pas toujours facile, elle défend ses valeurs, notamment autour du savoir-français. « Car l’éco-conception est bien sûr aussi une question d’éthique. Heureusement, aujourd’hui il y a un véritable engouement, ça bouge ! », conclut-elle.
En 2018, Lena Moreau a remporté le 1er prix du concours Design Zéro Déchet grâce à son projet « Gyre Normand ». Depuis, qu’est-elle devenue ? Comment concilie-t-elle design et déchets ? Quels sont ses conseils pour les futurs participants ? Réponses dans ce premier épisode de « Sur les traces de… ».
Lena est la conceptrice de Gyre Normand, un projet de camion-laboratoire qui se déplace de port en port pour sensibiliser le public à la pollution des océans, notamment par les déchets plastiques. Avec pour inspiration son expérience personnelle. « J’ai travaillé trois étés dans un port de plaisance, où je ramassais les déchets et j’amarrais les navires, raconte-t-elle. C’est en observant la masse d’objets flottants qui arrivait dans le bassin à chaque marée que j’ai eu l’idée de ce projet ».
Dans le projet Gyre Normand, touristes, plaisanciers, locaux et sportifs sont invités à rapporter au camion des déchets en polyéthylène collectés sur la plage. Le véhicule, équipé de bacs de recyclage, d’un broyeur et d’un rotomouleur, permet de leur offrir en échange un objet fabriqué in situ. Tous les usagers peuvent repartir avec un sceau, un pare-battage ou un tabouret en guise de souvenir zéro déchet ! Une idée qui a fait mouche, puisqu’elle a permis à Lena de remporter le 1er prix du jury.
Si Lena n’a pas encore pu concrétiser ce projet, elle en a développé plein d’autres ! La revue « Jus de bagarre » par exemple, est un magazine papier édité à 100 exemplaires, qui traite de design, de politiques publiques en passant par le voyage et la science-fiction… Trois numéros sont déjà sortis. « J’ai également fabriqué mon projet de diplôme de l’école Boulle : une buvette multifonction pour l’association sportive Basket Paris 14 », précise Lena.
Et aujourd’hui, elle continue d’associer design et prévention des déchets. Notamment en évaluant au mieux la quantité de matériaux nécessaires à la fabrication d’objets pour ne rien gâcher. Elle cite en exemple un projet de broderie d’un grand tapis à la main, dont elle a réalisé le prototype avec de la laine et de la toile de jute récupérés chez sa grand-mère. « Cela m’a permis d’anticiper précisément le métrage de ma toile et le nombre de pelotes à acheter », explique-t-elle. « De manière générale, quand je recherche un matériau, je vais d’abord vérifier s’il n’est pas en stock à La Réserve des Arts, une très grande ressourcerie à Pantin. »
Une démarche d’éco-conception assumée, même si Lena considère que « le travail de conception est intrinsèquement économe en matière, énergie et moyens, depuis toujours. C’est peut-être ce qui le différencie de la pratique artistique ».
L’éco-conception a donc toujours fait partie intégrante de la démarche de Lena, avant même sa participation au concours. Le dispositif Design Zéro Déchet a néanmoins permis de nourrir son travail : « la richesse de ce concours, c’est la rencontre avec les autres participants et leurs projets lors des différents événements organisés par le Syctom. Nous sommes restés en contact avec quelques jeunes ».
Et pour celles et ceux qui souhaiteraient se lancer dans l’aventure DZD, elle leur conseille d’aborder un territoire de projet qui les concerne. « On parle beaucoup mieux des choses qui nous sont familières, développe-t-elle. Que tu vives dans une cité ou dans un village à la montagne, tu es forcément « expert » d’un environnement particulier. Alors profites-en pour créer à partir de cette base singulière ! ».